Le système immunitaire des plantes

 Une image d'organismes immobiles, passifs et même vulnérables. De fait, elles sont confrontées à l'attaque d'une multitude d'organismes pathogènes tels les virus, les champignons, les vers nématodes, les bactéries, les insectes... (voir la. Les attaques de ces agresseurs et parasites se traduisent parfois par des maladies graves pouvant entraîner des pertes économiques importantes. Pourtant, la maladie chez les végétaux reste l'exception, car, au cours de l'évolution, les plantes ont appris à se défendre !
Ainsi, bien que dépourvues de cellules immunitaires spécialisées dans la protection de l'organisme, à l'instar des globules blancs des animaux, les plantes ne sont pas des victimes inactives : elles résistent. En effet, les cellules d'une plante, prises individuellement, peuvent déclencher une réponse immunitaire. Elles ont ainsi développé leurs propres armes et mis en place des défenses efficaces grâce auxquelles elles détectent les micro-organismes envahisseurs et les arrêtent avant qu'ils ne soient en mesure de causer des dommages importants. Nous dresserons ici un aperçu de ces défenses allant des barrières morphologiques constitutives à la mise en place de mécanismes cellulaires spécifiques. Pour ce faire, nous décrirons d'abord le principe général des interactions plantes-agents pathogènes et les placerons dans un contexte évolutif. Nous détaillerons ensuite la façon dont les végétaux reconnaissent les intrus. Enfin, nous donnerons quelques exemples de mécanismes de défense par lesquels les plantes neutralisent leurs agresseurs.

La course aux armements

Aujourd'hui, nous sommes en mesure de retracer l'histoire évolutive du dialogue moléculaire entre les plantes et les microbes. Nous pouvons donc retracer la course aux armements qui a opposé ces protagonistes pour déjouer les stratégies mises en place par chacun d'eux. Détaillons-en d'abord le principe avant d'en donner des exemples.
La première ligne de défense des plantes contre les agents pathogènes est formée par l'ensemble des barrières physiques de la cellule végétale, en particulier la cuticule et la paroi cellulaire. La cuticule, formée de cutine (une substance lipidique) et de cires, protège la surface des parties aériennes de la plante . La paroi pecto-cellulosique enveloppe quant à elle chaque cellule végétale . Cette paroi peut contenir de la lignine, un polymère hétérogène de composés phénoliques qui confère leur rigidité aux cellules. La lignine est ainsi le composant principal du bois. Les parois cellulaires lignifiées sont notablement imperméables aux agents pathogènes et difficilement consommables pour les insectes.
Certaines plantes ajoutent à ces barrières physiques des molécules chimiques antimicrobiennes (on parle de métabolites secondaires), tels que les alcaloïdes, par exemple le taxol de l'if, des terpénoïdes, telle la digitoxine de la digitale pourpre Digitalis purpurea ou des composés phénoliques. Toutes ces substances sont efficaces contre un nombre important d'agents pathogènes. Le plus souvent, ces défenses passives préexistantes constituent un obstacle suffisant contre la plupart des agents pathogènes.
Cependant, certains micro-organismes parviennent à s'affranchir de ces défenses, en infectant la plante par des ouvertures naturelles telles que les stomates, par une blessure, ou encore via l'action d'enzymes hydrolytiques. Ces molécules peuvent soit dégrader la cuticule et la paroi cellulaire, soit neutraliser les molécules toxiques en les métabolisant. Cette adaptation des agents pathogènes s'est traduite de façon concomitante par une spécialisation des organismes envers des familles de plantes particulières.
En « représailles », les végétaux ont développé un système de surveillance qui détecte l'intrusion des microbes et active des systèmes de défense. Pratiquement toutes les cellules vivantes des plantes sont dotées de ce double système de détection et d'activation. Ce système de défense met en jeu des événements cellulaires complexes conduisant à une résistance active vis-à-vis des micro-organismes pathogènes. Il est déclenché par la reconnaissance de structures moléculaires conservées et élémentaires de l'agent pathogène par des récepteurs membranaires présents à la surface des cellules végétales.
Ces éléments reconnus, nommés éliciteurs de réactions de défense, sont notamment des molécules communes à une famille de microbes, tels que des constituants structuraux. Ces éliciteurs sont de nature chimique diverse, peptidique, lipidique ou oligosaccharidique. Mais parmi ces éliciteurs, on trouve aussi des molécules d'origine végétale. Dans ce dernier cas, ils correspondent à des produits issus de la dégradation des parois par des enzymes hydrolytiques libérées par le pathogène ou l'hôte.
Ce premier niveau de défenses induites dans ce cas, nommé résistance basale ou résistance non hôte, correspond à l'immunité innée chez les plantes. Peu spécifique, il est ainsi efficace contre l'ensemble des membres d'une espèce, d'un genre ou d'une famille d'agents pathogènes. Il est activé lors de nombreuses interactions plantes et agents pathogènes.
Pour contourner ce premier niveau de résistance, certains agents pathogènes ont évolué et ont acquis des outils destinés à contrer cette résistance induite. 

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